Annulation du permis – CE arrêt 241.886
Intérêt :
- Le droit de recourir :
Etre résident à une adresse ayant vue sur un parc éolien, plutôt que propriétaire, donne droit également à recourir.
Avoir son habitation dans la zone de visibilité du projet, même séparé du parc par une autoroute, donne droit à recourir.
- Valeur des photomontages (p21) :
Démontrer en quoi un photomontage erroné fausse la perception.
- Problématique d’une extension de parc éolien :
- les permis peuvent être délivrés de manière autonome et se succéder dans le temps, le second tenant compte du premier.
- il n’est pas automatique que les deux parcs doivent être soumis aux mêmes conditions d’exploitation.
- il faut que la partie requérante démontre qu’il y a intention de saucissonnage pour faire passer plus facilement un permis.
- Motivation de l’acte attaqué :
P17 « En principe, la motivation d'un acte de l'administration active ne doit pas contenir de réponse à toutes les objections qui ont été émises au cours de la procédure d'enquête publique. Il faut, mais il suffit, que les motifs de l'acte attaqué rencontrent au moins globalement les réclamations et indiquent les raisons de droit et de fait qui ont conduit l'autorité à se prononcer, le degré de précision de la réponse étant fonction de celui de la réclamation. Autrement dit, lorsqu'au cours de l'enquête publique, des observations précises, dont l'exactitude et la pertinence sont corroborées par le dossier, ont été formulées, le permis délivré ne peut être considéré comme adéquatement motivé que s'il permet de comprendre les raisons pour lesquelles l'autorité passe outre, au moins partiellement, à ces observations.
- CE et erreur manifeste d’appréciation
P18 « Le contrôle du Conseil d'État sur la matérialité des faits et leur qualification est complet. Le contrôle de l'appréciation est marginal, limité à l'erreur manifeste d'appréciation. À cet égard, en effet, il n'appartient pas au Conseil d'État d'intervenir comme arbitre des appréciations divergentes de l'administration et de la requérante quant au bon aménagement des lieux. Il ne peut substituer son appréciation en opportunité à celle qui a été portée par l'autorité chargée de la délivrance du permis et ne peut censurer cette appréciation que dans le cas d'une erreur manifeste. L'appréciation est manifestement erronée quand elle est incompréhensible pour tout observateur averti. Il ne suffit pas de constater qu'au regard des mêmes critères, telle autre mesure paraît raisonnablement admissible ou semble même meilleure. Il s'agit de l'attitude qu'aucune autre autorité placée dans les mêmes circonstances n'aurait adoptée. Tout doute doit être exclu. »
- Impact sur le patrimoine immobilier :
Sont à prendre en compte :
- Patrimoine classé
- Patrimoine exceptionnel
- Patrimoine monumental de grand intérêt
- Sites classés
- Périmètres d’intérêt culturel, historique et esthétique (PICHE)
- Arbres et haies remarquables
- Dérogation : lignes de forces du paysage
P23 « Par ailleurs, une application correcte de cet article 127, § 3, précité, requiert que
- l'autorité ait d'abord une perception exacte des lignes de force du paysage,
« Celui-ci (le FD) décrit en détails, dans une rubrique "paysage existant", le paysage au niveau régional, au niveau local, le relief, les vues périphériques, la couverture du sol, les lignes de force, les points d'appel, les éléments remarquables, la dégradation visuelle, la typologie des villages, la qualité paysagère du site (qualifiée de faible), et enfin la qualité patrimoniale du site. Ce faisant, il montre qu'il a perçu les lignes de force du paysage existant. » P23
- qu'elle se représente ensuite l'impact du projet sur celles-ci et
« Il analyse ensuite la configuration spatiale intrinsèque du projet et insiste sur le fait que le paysage ne présente pas de ligne de force spécifique et structurante. Il poursuit son analyse en examinant les périmètres d'intérêt paysager, les points et lignes de vue remarquables, l'habitat, le patrimoine dans un rayon de 5 km, la co-visibilité et enfin, l'effet d'encerclement des unités d'habitat. »
- qu'elle établisse enfin la manière selon laquelle le projet respecte les lignes de force du paysage ou les structure ou encore les recompose. »
« S'agissant de la recomposition du paysage par le projet de parc éolien, il précise que "la disposition géométrique adoptée en deux lignes décalées courbes et parallèles à l'autoroute E42 est une configuration spatiale adéquate pour le site, en tenant compte des caractéristiques du paysage au sein duquel s'intègre et des éléments paysagers qui l'entourent ainsi que des éoliennes déjà autorisées". Ainsi qu'il l'indique, la ligne formée par les éoliennes 1B, 2B et 1A est parallèle à celle formée par les éoliennes 3B, 2A et 3A, lesquelles sont elles-mêmes parallèles à l'autoroute E42 et à la ligne à haute tension située au centre des deux lignes d'éoliennes. » (…) « Par ailleurs, la suppression du projet de l'éolienne 1B ne modifie pas cette configuration spatiale en parallèle de l'autoroute et de la ligne à haute tension, une des deux lignes d'éoliennes devenant simplement plus courte que l'autre. »
Motifs d’annulation :
Ni le FD dans son avis, ni l’auteur de l’acte attaqué n’examine l’impact du projet sur le Château de Spy ou sur sa drève, alors que cela avait été signalé lors de l'enquête publique. La mention « sans observation » ne suffit pas à motiver un permis. Qu’il ne soit pas classé, ne suffit pas à se dédouaner d’une analyse.
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>> CE arrêt 241.886 du 22 juin 2018